Les mots

Discrimination

Sur Paris, je suis l’Arabe

Manal
22 ans, Clichy-sous-Bois

« Je ne comprends pas cette volonté de toujours devoir poser une étiquette sur chaque tête. »

Que ce soit religion ou origine, je n’ai découvert le racisme vraiment qu’en sortant de ma ville. Je trouve qu’on est dans une ville assez diverse, on cohabite ensemble, j’ai des amis juifs, j’ai des amis musulmans, j’ai des amis athées, des amis chrétiens et d’origines diverses. On a vraiment presque toutes les religions présentes et représentées. J’ai grandi avec cette diversité que je ne trouve pas présente sur Paris. Vraiment j’ai eu un… il y a eu une sorte de choc culturel. Non pas du fait de mon origine mais du fait que cette mixité n’est pas présente sur Paris. Dès que j’arrive sur Paris, je suis l’Arabe. Je suis la Marocaine. Alors qu’ici on me voit plutôt comme Manal, une jeune fille. Je trouvais ça bizarre. Alors qu’on est censé être le pays des droits de l’homme… En fait, quand je sors de ma ville, on me donne une étiquette alors qu’on ne m’en donne pas ici. Je ne comprends pas cette volonté de toujours devoir poser une étiquette sur chaque tête. En fait les autres, enfin les Parisiens entre guillemets, ça leur vient instinctivement en fait. Ils ne s’en rendent pas compte.

Je me suis toujours considérée comme étant Française. Comme tous les Français, je suis née en France et j’ai vécu en France. Comme tous les Français quand je vais dans mon pays d’origine, le Maroc, je suis perçue comme étant « française, une étrangère » pas marocaine puisque je n’y habite pas. Et pourtant, les « Français de souche » (je n’aime pas employer cette expression mais je n’en trouve pas d’autres pour pouvoir illustrer mes propos) ne nous (enfants issus de l’immigration) considèrent pas comme étant Français. Nous ne sommes que des immigrés, nous ne sommes que des « Turcs », des « Arabes », des « Maliens », des « Chinois ».

Avant de faire face à tout cela, on m’a appris à l’école et dans la vie de tous les jours que la République est une et indivisible, qu’il y a un peuple français mais en sortant de ma ville je me suis rendu compte que les gens catégorisaient en « nous » et « vous »… Je suis déçue du fait que des personnes doivent subir cette discrimination qui est implicite et qu’il y ait un consensus social sur le nous et le vous. Je me sens impuissante.