Les mots

Médias

Les effets de la stigmatisation médiatique sur notre quotidien

Atelier d'écriture
Extraits

« Alors que notre mouvement était pacifiste, les médias ont montré la violence. »

Jeune femme, lycéenne : Au lycée, il y a eu un mouvement social. On était mobilisé contre la réforme du bac et Parcoursup. Tout se passait bien. Un jour, il y a eu un feu dans le lycée d’à côté, des poubelles ont été brûlées, ils sont venus devant notre lycée, ils ont retourné une voiture. Une photo a été prise. Et cette photo a tourné partout. Alors que notre mouvement était pacifiste, les médias ont montré la violence. On a peu parlé de nos revendications. Quand ça pète, les médias sont là. Mais quand on fait des choses bien, ils ne sont jamais là. Quand il y a des émeutes, les médias disent que c’est toute la ville, alors que c’est peut-être trois, quatre personnes. Quand les médias parlent des quartiers nord, ils disent c’est « les quartiers nord ». Quoiqu’il se passe dans Marseille c’est « les quartiers nord ». Pour eux, c’est tout le quartier qui est trafiquant. Les gens qui ne connaissent pas ne vont reprendre que cette image-là parce qu’ils ne connaissent que ça. La banlieue, on l’exotise et on lui met plein de problèmes. Un mec qui regarde ça tout seul chez lui, qui ne vient pas en banlieue, évidemment il va fantasmer dessus. Je ne sais pas si vous avez entendu parler de l’orientalisme, comment on fantasmait sur le Moyen-Orient, ben là c’est pareil il y a un orientalisme banlieue.

 

Jeune homme, animateur : J’ai fait plusieurs séjours avec des jeunes. Quand on arrive et qu’on dit qu’on vient de Saint-Denis, les gens disent « la Seine-Saint-Denis ? » dans le sens où déjà il y a un problème… Au cours du séjour, ils voient que les petits sont respectueux, qu’ils se mélangent bien, que ça se passe bien… Finalement les appréhensions qu’ils avaient sur notre groupe changent. Mais pour ça il faut que l’animateur et le groupe soient carrés. On doit faire double effort. On va mettre un papier dans la poubelle alors que c’est pas le nôtre. C’est pas évident. Je l’ai vécu. Que ce soit les agents de sécurité du camping ou le directeur… Tu fais un travail avec les jeunes et les gens qui sont autour de toi. Nous, on se sent victimes. Et quand on sort de notre cocon, de notre quartier, on le ressent à l’extérieur. Que tu ailles sur Paris ou en province tu le ressens grave.

 

Jeune homme, en alternance : Là où je travaille, la première fois que je leur ai dit que je venais du 93, il y a trois, quatre petits bobos qui étaient super choqués, qui ont demandé si je dormais bien, si ce n’était pas trop chaud, si j’avais de l’eau ! C’est vraiment déconnecté de fou, je ne savais même pas que ça existait. Avec mes collègues maintenant, chaque fois qu’ils me vannent un peu et que je n’arrive pas à m’en sortir, je dis « attention je viens du 93 » pour rigoler, et ils savent que c’est pour rigoler. Mais ce qu’ils m’avaient dit, je l’ai vraiment mal pris, ils étaient super sérieux. C’était un tour de table quand je m’étais présenté. Il y avait des gens de plusieurs régions de France. Eux, ils rigolaient entre eux, bon ils étaient plus âgés, j’étais le plus jeune, mais ça m’a vraiment fait chier : « comment ça, j’ai de l’eau ? ».

 

Médias - Pantin

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