Les mots

Zyed & Bouna

Gravée à tout jamais dans l’histoire des quartiers

Mehdi Bigaderne
ACLEFEU ! Clichy sous Bois

« Une fois de plus, l’institution policière a souhaité minimiser son rôle et stigmatiser les jeunes des banlieues, profitant d’un contexte politico-médiatique anti-banlieues. »

Après la mort de Zyed et Bouna, la police, par la voix de son représentant syndical, a déclaré à la presse qu’aucune course-poursuite n’avait eu lieu ; ce qui bien évidemment était FAUX !!!

Ces derniers sont allés jusqu’à faire signer une déclaration au jeune Muhittin alors qu’il était hospitalisé et mineur lors des faits. Par ailleurs, il a également été dit que les jeunes s’étaient introduits dans un chantier pour y commettre un vol, ce que l’enquête a fermement démenti par la suite. En tout état de cause, il y avait une volonté manifeste de désengager la responsabilité des agents de police, par tous les moyens, dans cette affaire. Une fois de plus, l’institution policière a souhaité minimiser son rôle et stigmatiser les jeunes des banlieues, profitant d’un contexte politico-médiatique anti-banlieues.

De plus, l’histoire de l’attaque de la mosquée Bilal à Montfermeil par la police, qui a tiré en pleine prière de ramadan des grenades lacrymogènes, a provoqué l’effondrement à terre de mères de famille, d’enfants et de chibanis. Ce nouvel acte de violence a conduit un certain nombre de jeunes qui étaient pacifiques, à devenir actifs dans ces révoltes urbaines. Je pense que cet épisode des révoltes est la goutte d’eau qui a fait déborder le vase. L’embrasement général est parti de là ! Beaucoup de jeunes disaient « d’abord on s’attaque à nos petits frères, et voilà que maintenant on s’attaque à notre religion ». Voilà le sentiment qui régnait dans le quartier ! Les révoltes urbaines ont duré trois semaines et se sont amplifiées et étendues à tout le pays et au-delà de nos frontières.

Tous les quartiers de France ont été touchés par notre histoire. Il fut malheureusement très compliqué d’obtenir l’ouverture d’une information judiciaire. Et une fois cette dernière ouverte, c’est un long combat de 10 ans et de démarches juridiques qui s’est imposé aux familles de Muhittin, Zyed et Bouna. L’épilogue de ce périple judiciaire s’est achevé à la cour d’appel de Rennes, confirmant un non-lieu à l’égard des agents de police, balayant ainsi d’un seul revers l’extrême douleur des familles. Tout comme les familles, j’ai vécu ce procès avec beaucoup d’émotion et de violence.

 Cette histoire a marqué à tout jamais ma vie et anime mes divers engagements. Elle est également à tout jamais gravée dans l’histoire des quartiers populaires français. Encore aujourd’hui, chaque 27 octobre, nous rendons hommage et nous nous inclinons devant la mémoire de ces deux adolescents à Clichy-sous-Bois près de la stèle érigée en leur souvenir.

En 2005, Mehdi Bigaderne avait 23 ans, était éducateur socio-culturel et étudiant à Paris 8. Il résidait dans le quartier des Bois du Temple à Clichy-sous-Bois.

 

Zyed et Bouna - La spirale infernale

Zyed et Bouna - La spirale infernale