Les mots

Discrimination

Si on parlait de discrimination ?

Atelier d'écriture
Extraits

« Je pense qu’on est une génération où tout le monde est mélangé. À partir de notre âge, je pense que le racisme n’existera plus. »

Avec mon frère, on visitait le centre-ville de Mulhouse. On s’est arrêtés dans un salon de thé. On a attendu une demi-heure sans que le serveur vienne. C’était comme si on n’existait pas. On était deux Noirs dans une marée blanche. On est partis.

Dans mon club, je peux jouer avec un petit foulard. Un jour, l’équipe contre laquelle on jouait nous a obligées à réduire le voile pour qu’il couvre seulement notre bonnet. Le match a été terrible. Les tribunes blanches nous insultaient. Il n’y a pas eu de rappel à l’ordre du public. Les fautes de l’autre équipe n’étaient pas sanctionnées. On a fait un recours. Mais sans suite : notre équipe a dû payer une amende.

J’étais petite. À l’école, je devais prendre un médicament tous les jours. La médecin parle seulement à moi, pas à ma mère. Comme elle est voilée, elle suppose qu’elle ne sait ni parler français ni lire ni écrire, alors qu’elle est diplômée !

Dans la classe, j’étais la seule Arabe et la plus jeune. J’avais l’impression que la prof me réservait un traitement de faveur, qu’elle me donnait plus d’attention ; comme si moi j’avais besoin de plus d’aide que les autres, comme si j’étais une âme à sauver. C’est gênant, vis-à-vis des autres élèves. Même si ça part d’une bonne intention, je me sentais mise à l’écart.

Si on montre qu’on a des diplômes ou une expérience, on peut retourner une situation. Dans un entretien d’embauche, j’ai montré que je connaissais très bien les films étrangers, les réalisateurs… Alors, ils voulaient m’embaucher. Mais j’ai renversé la situation. J’ai dit : « Je vous laisse mon CV ! Je vous rappellerai si ce poste m’intéresse ! ». D’habitude, c’est eux qui disent ça, mais ils ne te rappellent jamais…

À une journée du patrimoine, j’ai décidé d’aller à la visite de l’église. J’étais le seul Arabe. J’étais content de le faire. En faisant cette visite, j’ai voulu réagir aux préjugés.

Je rentre dans un magasin de vêtements. Je sens que le vigile me regarde avec insistance, mais je passe outre. Je me déplace dans les rayons pour chercher une jupe pour ma soirée de demain. Je fais le tour, rien ne me plaît donc je décide de sortir. À quelques mètres de la sortie, je sens qu’on me soupçonne d’avoir volé quelque chose ; mais je me dis « Reste naturelle, t’as rien fait, garde la tête haute ». À force de vivre ce genre de situations, je me sens limite coupable de sortir sans rien acheter.

Je pense qu’on est une génération où tout le monde est mélangé. À partir de notre âge, je pense que le racisme n’existera plus.